Chers Collègues,

Vous avez exprimé votre vive émotion et votre réprobation unanime face aux odieux assassinats et à la prise d’otages qui se sont déroulés la semaine passés.

Au travers d’une simple épicerie, c’est toute une communauté, religieuse et culturelle, partie prenante, comme d’autres, de la construction de notre démocratie depuis des siècles, qui était visée.

Au travers des agents des forces de l’ordre, agents du service public, au service des citoyens, c’est la République, qui permet l’accès de tous, sans distinction d’opinion, d’origine, de religion, aux emplois publics, qui était visée.

Au travers du journal Charlie Hebdo, c’est la liberté d’expression, condition nécessaire pour le développement du savoir et de l’esprit humain, qui était visée.

Le refus des discriminations, le respect des libertés individuelles et collectives, ces principes fondamentaux, qui sont au cœur des missions des personnels enseignants, d’éducation et d’orientation, du second degré, le Snes-fsu les défend depuis de très nombreuses années, et continuera de les défendre.

C’est pourquoi, aujourd’hui, les mesures restrictives des libertés qui sont en projet, ou déjà en œuvre sont pour nous inacceptables. Les consignes de la Rectrice, qui a immédiatement interdit toute prise de parole des enseignants qui ne soit pas d’abord autorisée par ses services, sont une injure à la mémoire des victimes, et une atteinte scandaleuse aux principes qui ont justement été visés par les terroristes.

Le Snes-fsu ne se laissera pas entraîner dans des logiques qui, derrière un unanimisme hypocrite, visent surtout à faire avaliser des politiques liberticides, contraires à l’égalité, stigmatisantes, créant les conditions de l’émergence de ces mouvements sanguinaires et des extrémismes qu’on prétend combattre.

Une chape de plomb sur la détresse ne la fait pas disparaître. Elle conduit au désespoir, et à la haine aveugle.

Alors qu’une fois de plus, les enseignants ont été envoyés en première ligne pour assurer, en direction des élèves, le service de communication de l’Etat, on continue de leur refuser les moyens d’assurer tout simplement leur mission première d’éducation de la jeunesse.

Drôle de vision de notre métier : sommés de faire toujours plus avec toujours moins, de faire « des efforts » alors que les revenus des recteurs ont été revalorisés de l’équivalent d’un salaire annuel d’un certifié en fin de carrière, de jouer les pompiers quand tout va mal, mais de nous taire pour ne pas « déranger »...

Le Snes-fsu ne renonce ni à dénoncer l’horreur, ni à refuser les atteintes aux libertés, ni à réclamer que nos jeunes bénéficient partout, quelles que soient leur situation sociale, leur passé, leur état-civil, leur religion, leur origine, des conditions d’études qui leur permettraient de réussir. Si l’école a un rôle à jouer contre les fanatismes, encore faut il qu’elle ait les moyens de faire son travail.

Renoncer est contraire à l’idée même que nous nous faisons de notre métier. C’est l’exact opposé de notre syndicalisme.

Le Snes-fsu défendra donc tous les collègues qui se verraient inquiétés et remis en cause dans leur légitime liberté d’expression.

Il continuera de mobiliser la profession pour une vraie priorité pour la jeunesse, et d’abord dans la grève nationale du 3 février prochain.

Nous ne renonçons pas. Ne renoncez pas !

A bientôt dans l’action, pour une école plus juste, une société meilleure, et plus humaine.

Bien cordialement,

Hervé Le Fiblec
secrétaire académique du Snes-fsu