Nous vivons une période bien baroque.

Tandis que le vent de la crise semble avoir bien faibli, les nuages s’accumulent sur la tête des salariés à qui on demande de faire encore et encore des « efforts » pour « redresser l’économie ». Mais, dans un monde où l’on considère qu’un « pacte » peut sembler raisonnable quand il engage, sans leur demander leur avis, ceux qui n’ont pas grand-chose à donner plus, tandis que ceux qui ont déjà tout ne s’engagent qu’à recevoir encore et encore, il ne faut pas s’étonner que la frontière entre les faits et les discours, les paroles et les actes, les intentions et les résultats, soit chaque jour un peu plus brouillée, ouvrant la porte aux populismes et à la démagogie dangereuse de l’extrême droite.

Il en est ainsi dans notre académie, pour laquelle le discours de la priorité à l’éducation va de nouveau se traduire par une rentrée dégradée dans les lycées, avec une dotation en postes largement inférieure aux besoins liés à la hausse des effectifs d’élèves, mais aussi dans nombre de collèges. Quant aux établissements « super-prioritaires » dit « REP+ » de la nouvelle politique d’éducation prioritaire, leur mise en place se traduit par une plus grande charge de travail pour les personnels...

Mettre en rapport les discours et les actes fait partie du travail du syndicat. Notre bon Recteur n’a guère apprécié qu’on le mette face à ses contradictions. Alors qu’il veut afficher une image bonhomme de père tranquille qui discute et écoute, la réalité de sa politique est toute autre, et sur le fond n’est guère différente de celles des recteurs précédents, nommés comme lui par Sarkozy : application violente de ses marottes, notamment les fusions d’établissements, refus de communication sur les réformes qui se font mal, comme la création de l’ESPE, contre-vérités et faux engagements vis-à-vis des représentants des personnels, comme c’est le cas depuis septembre sur la question des obligations de service dans plusieurs lycées, choix des chefs d’établissement comme interlocuteurs privilégiés, sans compter quelques coups bas assez mesquins contre les personnels, qui se voient refuser le paiement de l’heure de vie de classe au motif qu’ils sont professeurs principaux, ou sur qui on fait pression pour qu’ils ne participent plus aux heures d’information syndicale.

Au final, M.Beigner n’aime les représentants des personnels que lorsque ceux-ci se taisent ou rivalisent d’amabilités à son égard, oubliant leur mission première qui est la défense des personnels et du service public. Il leur préfère de toute façon le corporatisme étroit des cadres, qu’ils se poussent du coude dans les couloirs du rectorat ou qu’ils se complaisent dans un autoritarisme de bac à sable, comme dans nombre d’établissements.

Alors l’embellie du dialogue social de l’année 2012 aura donc été de courte durée. Comme la fleur de Malherbe, «  Rose, elle a vécu ce que vivent les roses, l’espace d’un matin  »...

Mais à trop vouloir faire la pluie et le beau temps, proviseurs, principaux, recteurs, ministres et autres puissants devraient se méfier de la tempête qui pourrait monter.

Il n’appartient qu’à nous de faire tourner le vent, pour obtenir enfin les fruits de notre travail.

Hervé LE FIBLEC
secrétaire académique