C’est en vertu des missions fondamentales de la Fonction Publique qu’aux lendemains de la seconde guerre il a paru évident que l’agent doit participer aux décisions concernant ses conditions de travail, son statut, sa carrière, au nom d’un droit valable sur l’ensemble du territoire. Mais les technocrates démagogues qui nous font la leçon du modernisme n’aiment pas trop les leçons de l’Histoire. Cela n’étonne pas.
Cette implication de l’agent se concrétise par la syndicalisation et les instances paritaires, parce que le salarié travaille entre des obligations et des droits qui ne peuvent être « arbitraires » et sans son consentement, sans un « accord ». Et dans ce domaine, quand le droit perd son échelle nationale, il disparaît.
Remplacer la réglementation nationale (avec des nuances, fort bien) par des arrangements locaux de moins en moins contrôlables, compter sur le « tout négociable », sans réglementation et contrôle accrus, c’est un leurre, car on omet, l’air de rien, la question du pouvoir.
Comme dans tous les corps de métiers il y a des syndicats ou ce qui s’y assimile, même pour le patronat ! Et cela remonte aux corporations commerçantes, pas vraiment une machine de guerre marxiste.
Monsieur Blanquer, parmi ses confrères Hauts Fonctionnaires d’État, est un artisan de l’aveuglement idéologique anachronique du « libéralisme », et il lui faut faire taire la contestation, ou même le débat, et aussi le paritarisme. N’est-ce pas étrange de s’attaquer au paritarisme, de dénigrer aussi le syndicalisme, quand on prétend vouloir libérer les initiatives, le dialogue ? Ça dépend qui dialogue et qui a des initiatives…
Dans la confusion entretenue par ces Messieurs, Dames et Demoiselles du macronisme, un réapprentissage du droit du travail semble devenu nécessaire…
Car il nous faut combattre le bourrage de crâne contre la Fonction Publique, contre une propagande malsaine qui finit même par faire accroire au fonctionnaire lui-même que son statut est à jeter, que c’est inévitable et qu’il n’a pas le droit de se défendre.
Le gouvernement, dans la ligne du productivisme dit « ultra-libéral », et avec un exécutif de plus en plus musclé, travaille à séparer le droit citoyen et le droit dans l’entreprise, à isoler et précariser le salarié. Et c’est bien cette même opération qui est engagée dans la Fonction Publique : déréglementation, réduction des bases pour défendre ses droits, ses revendications.
Le dénigrement du syndicalisme est organisé en appui, il n’a du reste rien de nouveau : l’anti-syndicalisme naît avec le syndicalisme, que l’on prétend inutile et non représentatif.
Il faut regarder à qui profite en fin de compte d’empêcher le syndicalisme ou de le réduire à quelques délégués du personnel sans aucun pouvoir.
Quant à l’utilité, elle semble suffisante quand il s’agit de droit et de conditions de travail. Quant à la représentativité, les élections professionnelles sont une chose fort sérieuse, et l’on n’attend pas de leçons de représentativité de la part d’un gouvernement beaucoup moins pinailleur sur le sujet quand il s’agit de sa propre situation électorale. Mais le mot d’ordre présidentiel semble avoir été passé : « On va jusqu’au bout, quoi qu’il arrive. » Faut-il en être fier ?
Les salariés, et donc les fonctionnaires (même avec la fameuse « sécurité de l’emploi »), participent aux décisions concernant leur salaire, leur statut, leurs missions, leur carrière, leurs conditions de travail. Si le fonctionnaire ne le fait pas sur contrat, il n’est évidemment pas privé de ses droits. Et il est assisté pour cela par des syndicats d’envergure nationale. Même si cela donne de l’urticaire à certain.e.s.
Les conditions de travail et les relations hiérarchiques ne sont pas des sujets simples, anodins, contingents et sans droit de revendications collectives chez les enseignants – même au nom d’on ne sait quelle 4e dimension où ils vivraient, entre le bonheur d’être des nantis et celui d’être quotidiennement entourés par la jeunesse.
Et les instances paritaires sont justement en danger. La vulnérabilité de l’agent augmente : dans l’établissement, devant les Rectorats, face aux DRH, en commissions paritaires (torpillage prévu pour janvier prochain), même dans les organes veillant à la sécurité (réduction du rayon d’action des CHSCT).
A nous, chers et chères collègues, de nous demander s’il faut valoriser le courage de subir, ou plutôt celui de réagir.